Que peut-on bien encore écrire sur Daniel Bevilacqua et sa vingtaine d’albums en cinquante ans de carrière ? Remonter le fil de la passion de l’éternel créateur d’Aline et des Mots bleus pour John Lee Hooker et le regretté Alan Vega ? Redire la cohérence absolue du parcours de l’un des derniers dandy toxiques d’ici, frère de cœur depuis Montparnasse du New-York de Bowie et de Lou Reed, naviguant en flibustier sur les mers troubles de la variété ? Sur le fil de sa voix cristalline et fragile, l’équilibriste pop et le perfectionniste expérimental Christophe ne triche pas, tout entier dans ses créations sonores et son art maniaque de la texture du mot en français. Sous une photo d’Elvis, une Cadillac miniature posée sur un vieux juke-box, après avoir aligné quelques chefs- d’œuvre (Le Beau Bizarre) et tubes (Succès Fou), il reste à soixante-dix ans, les deux pieds dans le monde moderne et ses évolutions musicales. Pour ce nouvel album, Les Vestiges du Chaos, fruit de sept années de travail, épaulé pour les textes par son vieux complice Jean-Michel Jarre, par Boris Bergman et Daniel Bélanger, secondé par toute une brochette de voix et de plumes féminines (dont Laurie Darmon), il continue sa quête des sons synthétiques et sensuels, de l’élégance absolue du non-chant, d’une musique nocturne et cinématographique aimant autant l’électricité que la soie des crooners. Il s’est embarqué pour une nouvelle tournée et des concerts à l’exceptionnelle incandescence. Le temps n’a pas de prise. Alors inutile de crier, ce type n’est jamais parti. Il débarque même dans nos murs comme un cadeau de Noël.