Formé par une mère évangéliste à la stricte discipline du gospel, à Saginaw (Michigan), puis à Atlanta (Géorgie), Curtis Harding est passé en trois albums solo, du statut de parfait outsider à celui de nouveau point culminant de la soul américaine. De Soul Power (2014), Face Your Fear (produit en 2017 par Danger Mouse et Sam Cohen) à If Words Were Flowers (2021), une même rigueur dans cette synthèse, à la fois savante et populaire, de soul, de rock, de blues, de gospel, de psyché et de R&B qu’il nomme lui-même le « Slop’n’Soul ».  Sur ce dernier, retrouvant à la fois son complice Sam Cohen à la production et le souffle épique des grands combats égalitaires nord-américains des années 1970, il se plonge dans une esthétique rétro, avec force strass et paillettes, oscillant entre les micro-symphonies d’Isaac Hayes, les volutes sophistiquées de Donny Hathaway et l’ombre tutélaire protectrice de Curtis Mayfield. Partout, un groove vintage implacable, une écriture soignée et une admirable sensualité vocale, un attachement viscéral au patrimoine afro-américain doublé d’un revigorant appel à l’amour… Comme son alter-ego britannique Michael Kiwanuka, Curtis Harding propulse la soul d’aujourd’hui dans les limbes d’un futur condamné à danser.