En d’autres temps et géographies, René-Paul Roux serait une légende vivante du « twelve-bar », ces douze mesures qui ont définitivement guidé au déroulement de sa vie d’artiste.

De ses débuts dans les années 1970 avec le Bracos Band, puis en anglais avec Backstage, à l’explosion solo de son Barjoland (1984) qui l’installe à côté de Bill Deraime dans le gratin du « blues en français », Paul Personne aura à peu près tout vu et tout vécu d’une vie de musicien. Une vingtaine d’albums solo, quelques tubes et des lives à la pelle, une vraie modestie et un parcours têtu d’artisan de la six cordes et de chanteur, qui se poursuit aujourd’hui sur ce Funambule, sous titré « tentative de survie en milieu hostile ». Deux ans après la parenthèse joueuse et collective du Lost in Paris Blues Band (avec notamment le virtuose américain Robben Ford), Paul Personne est au sommet de ce bluesrock tendu. Jouant cette fois de la complémentarité entre sa fidèle Gibson Les Paul Goldtop et les claviers vintage (Hammond, Wurlitzer, Rhodes), il pointe riffs, licks et solo, se régale à donner la réplique à sa propre voix, toujours voilée et rocailleuse, à pimenter ses textes sombres évoquant notre monde en déroute. Sur ce ping-pong musical généreux et fluide, son jeu de guitare unique s’en donne à coeur joie. Un album chaleureux et d’une honnêteté profonde, tout à l’image de ce guitar hero français discret qui vient de fêter ses soixante-dix ans.